Messe chrismale – homélie de Mgr Nicolas Souchu
Lundi Saint, 25 mars 2024
Basilique Notre-Dame de Buglose
Chers frères prêtres et diacres,
Chers frères et sœurs,
Quelle joie de nous retrouver au sanctuaire Notre-Dame de Buglose pour la messe chrismale ! C’est ici-même, que le 10 septembre dernier, j’ai eu la joie de convoquer le synode diocésain. C’est ici-même que le 3 décembre 2023 nous avons célébré son ouverture, à partir de la croix du synode, de l’Évangile et de la profession de foi des membres de l’assemblée synodale. Notre démarche avance : actuellement nous en sommes au stade du travail des équipes synodales.
Il n’est donc pas du tout anodin que nous nous retrouvions au début de la semaine sainte pour célébrer la messe chrismale avec l’ensemble du Peuple de Dieu, en particulier avec les prêtres qui vont renouveler les promesses de leur ordination sacerdotale, puis avec les diacres permanents. Je suis heureux de saluer les catéchumènes qui vont bientôt célébrer les trois sacrements de l’initiation chrétienne : le baptême, la confirmation et la première communion. Je salue également les membres de l’assemblée synodale et surtout ceux et celles qui travaillent dur pour que notre synode diocésain soit vraiment le fruit de l’Esprit-Saint.
Alors, n’oublions pas la force de l’onction.
« L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. » C’est ainsi que s’exprime le prophète Isaïe. Et le Christ nous interpelle en nous disant que cette parole de l’Écriture, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit.
En effet, n’oublions pas la force de l’onction avec le Saint-Chrême, reçue au baptême, à la confirmation, à l’ordination sacerdotale et épiscopale ; n’oublions pas la force de l’onction avec l’huile des catéchumènes reçue par eux sur le chemin de l’initiation chrétienne ; n’oublions pas la force de l’onction avec l’huile des malades reçue par eux dans l’épreuve.
Et c’est cette force de l’onction qui nous permet d’oser l’espérance dans nos communautés chrétiennes. Voyons comment elle stimule notre démarche dans les trois itinéraires de notre synode diocésain.
Tout d’abord, des communautés ancrées dans le Christ
Vous savez que le mot christ est la traduction grecque de l’hébreu messie. En français christ veut dire l’oint, celui qui a reçu l’onction. Nos communautés chrétiennes sont donc ancrées dans l’onction ! L’onction commune à tous les disciples du Christ, hommes et femmes, est celle du baptême. Quelle force que cette onction baptismale. Elle nous permet de ne pas tomber dans la tentation de la réussite. Vous le savez, le but de l’Église n’est pas la production, mais la fécondité ! L’espérance (Osons l’Espérance !), est liée à la vie. La mission de l’Église n’est pas de semer des illusions, mais de donner foi en la vie depuis son premier instant dans le sein de la mère jusqu’à son dernier souffle. C’est parce que nous sommes ancrés dans la force de l’onction que les vrais professionnels de la construction de l’Église, ce sont les saints. C’est parce que nous avons reçu la force de l’onction que nous sommes appelés à devenir des saints. D’ailleurs le sacrement de pénitence et de réconciliation, si délaissé aujourd’hui par de nombreux chrétiens, nous remet dans la nouveauté de notre baptême. Oui, osons l’espérance par la force de l’onction qui permet à nos communautés chrétiennes d’être ancrées dans le Christ.
Ensuite, des communautés renouvelées par l’Évangile
Comme à la célébration des conciles, et notamment celle de Vatican II, l’évangéliaire a été et sera au cœur de l’assemblée synodale. L’Église, c’est la foi, mais c’est la foi que Dieu met en chacun de nous, comme il l’a fait particulièrement pour l’apôtre Saint Pierre. La foi c’est d’abord la confiance que Dieu nous fait. Et c’est ainsi que nous sommes marqués à jamais par l’onction notamment à notre baptême et à notre confirmation, par le Saint Chrême. Et quand Dieu met sa marque en nous, lorsqu’il nous fait confiance, il ne la retire jamais. L’Évangile n’est pas un acte de force, mais de douceur. La force de l’onction doit nous aider à ne pas répondre uniquement de manière profane aux enjeux de l’avenir de l’Église et du monde, car c’est souvent cela qui nous fatigue dans notre ministère ou notre engagement ecclésial. Oui, osons l’espérance par la force de l’onction qui permet à nos communautés chrétiennes d’être renouvelées par l’Évangile.
Enfin, des communautés ouvertes aux changements du monde
Les plus grands missionnaires sont également les plus grands priants. C’est dire qu’ils fondent leur mission sur la force de l’onction qui traverse notre personne de baptisé-confirmé, dans nos différents états de vie. N’oublions pas que l’Évangile ne propose pas une idéologie, une parmi tant d’autres, mais un idéal. Dieu ne nous demande pas de faire des choses impossibles, il nous demande seulement d’y croire. Et comment y croire sans la force de l’onction ? Nous n’annonçons pas l’Évangile pour gagner, pour être plus nombreux, mais parce que nous essayons d’abord de le vivre et nous savons qu’il est l’Évangile du salut, le kérygme. Nous n’annonçons pas l’Évangile pour le plaisir d’avoir raison, mais pour entrer en dialogue, en conversation avec nos contemporains. Nous n’annonçons pas l’Évangile avec l’esprit ou la manière du monde, ce qui risquerait de nous mettre en concurrence ou en repli identitaire. La force de l’onction nous invite à être humbles et à vivre en vérité. Dieu seul connaît la profondeur dans laquelle la vocation de chacun se déploie. Oui, osons l’espérance par la force de l’onction qui permet à nos communautés chrétiennes d’être ouvertes aux changements du monde.
Alors si nous croyons en la force de l’onction pourquoi y a-t-il moins de monde à la messe de confirmation de jeunes ou d’adultes que le dimanche précédent ? Si nous croyons à la force de l’onction pourquoi lors de l’ordination d’un diacre permanent n’y a-t-il que les connaissances du diacre à participer à cette célébration ? Et si un jour Dieu nous donne la grâce d’ordonner des prêtres, la cathédrale sera-t-elle à moitié vide … ou bondée ? Osons l’Espérance !
Puisque dans un instant nous allons bénir l’huile des malades, l’huile des catéchumènes et consacrer le Saint-chrême, n’oublions pas la force de l’onction.
+ Nicolas SOUCHU
Évêque d’Aire et Dax