
Homélie du lundi 3 avril 2023
Messe Chrismale à la Cathédrale de Dax
Chers frères et sœurs,
Chers frères prêtres et diacres,
Le 31 mars 1933, il y a donc eu 90 ans vendredi dernier, l’évêque d’Aire et Dax avait obtenu du pape le transfert de la ville épiscopale d’Aire à Dax. En effet, après la loi de séparation des Églises et de l’État, l’évêque avait été expulsé de son évêché d’Aire le jour de Noël 1906. Après plusieurs années de tâtonnements, la ville de Dax retrouvait le siège de l’évêché, perdu à la Révolution française, et cette église, Notre-Dame de l’Assomption, son titre de cathédrale. La cathédrale d’Aire-sur-l’Adour devenait alors officiellement co-cathédrale.
Voilà pourquoi je suis heureux que nous puissions célébrer la messe chrismale dans notre cathédrale et je remercie tous ceux et celles qui, autour du curé de la paroisse Saint-Paul-Saint-Vincent-de-Dax, ont œuvré pour que nous puissions vivre une belle célébration.
Je mesure évidemment le contexte sociétal dans lequel nous vivons ces dernières semaines ainsi que les menaces de guerre qui éclatent un peu partout dans le monde et notamment aux portes de l’Europe.
« Le Seigneur m’a consacré par l’onction. » Tel est le passage du prophète Isaïe dont le Christ a fait la lecture dans la synagogue de Nazareth, avant de conclure : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture. » Je voudrais donc, en ce jour, évoquer l’onction du Saint Chrême, reçue le jour de notre baptême et de notre confirmation (et je me réjouis de la présence de plusieurs adultes qui seront prochainement baptisés et confirmés), et le jour de notre ordination sacerdotale ou épiscopale ; ainsi que l’onction de l’huile des malades et l’onction de l’huile des catéchumènes. Si cette onction n’est pas seulement un rite, mais si elle manifeste la grâce reçue pour la mission, portons notre attention sur les parties de notre corps qui reçoivent l’onction :
La tête
L’onction sur la tête, avec le Saint Chrême, est reçue à notre baptême, à notre confirmation et à l’ordination épiscopale. Il en va de même avec l’huile des malades.
Cette onction doit nous permettre de garder une tête bien lucide, d’acquérir une hauteur de vue et une profondeur de réflexion. Dans la bible, celui qui est choisi reçoit l’onction qui lui confère ces qualités. L’onction sur la tête permet ainsi de pouvoir discerner quelles sont les situations de médiocrité : les nôtres, celles de l’Église, celles du monde.
La tête est le lieu de nos principaux sens comme la vue et l’ouïe. Elle permet donc de voir et d’entendre quel est l’état de notre communauté paroissiale, de notre communauté religieuse, de notre famille.
Finalement l’onction nous permet de ne pas nous prendre la tête, car c’est Dieu qui nous consacre par l’onction et c’est le Christ qui est la tête de l’Église. Nous dépendons totalement de lui ; il faut lui faire confiance. Nous avons à nous en souvenir tandis que nous vivons la synodalité de l’Église.
Les mains
C’est dans les mains qu’est reçue l’onction avec le Saint Chrême pour l’ordination sacerdotale. Il en va de même avec l’huile des malades et l’huile des catéchumènes. Cette onction nous donne la capacité, en fonction de notre situation, d’affronter le monde et de nous prendre en mains.
Nos mains ointes sont le signe de notre capacité à donner. C’est pourquoi, notamment, les mains du nouveau prêtre sont ointes, afin que celui-ci, non seulement se donne, mais nous donne le corps et le sang du Christ, comme ministre de l’Eucharistie.
Dans la vie ordinaire nos mains rassurent et libèrent. C’est ce que fait le Christ qui touche ainsi l’humanité dans la maladie, la souffrance et la mort.
Les pieds
C’est Marie-Madeleine qui verse du parfum sur les pieds de Jésus, lui faisant ainsi une sorte d’onction. L’Église ne fait pas l’onction sur les pieds, mais le Christ lave les pieds de ses disciples, avec la même symbolique qu’une onction : il se met à leur niveau pour les soulager.
Les pieds assurent le contact avec le sol et nous stabilisent. Ainsi, nous ne pouvons pas rester fermes dans notre vocation et notre mission si la base de notre vie est instable. Les pieds représentent la solidité, la stabilité et la mobilité.
Oui, comme ils sont beaux les pieds de ceux et celles qui annoncent la Bonne Nouvelle du Kérygme : la passion, la mort et la Résurrection de Jésus. Un grand rassemblement national à Lourdes, intitulé Kerygma, se tiendra au mois d’octobre. Les jeunes qui participeront aux JMJ de Lisbonne fin juillet-début août apprécieront également que leurs pieds soient lavés.
L’onction sur plusieurs parties de notre corps signifie, frères et sœurs, que c’est notre âme tout entière qui est ainsi ointe. Notre âme, du latin anima, le souffle qui donne la vie, procède du souffle divin. Nous le savons, un corps sans respiration n’a plus de vie. Ainsi, avec les ministres ordonnés, beaucoup de laïcs et de consacrés s’engagent dans l’animation de nos communautés chrétiennes, en particulier de nos paroisses ou ensembles pastoraux, des services diocésains et des mouvements. Le samedi 27 mai nous sommes tous invités à nous retrouver au sanctuaire Notre-Dame de Buglose. En cette veille de Pentecôte nous pourrons vérifier comment va notre âme ecclésiale, c’est-à-dire l’animation pastorale, celle qui donne la vie, qui communique, qui fait circuler le souffle divin.
Voyez, frères et sœurs, qu’avec l’onction nous sommes invités à aller à l’essentiel, à oser l’espérance. Beaucoup de nos contemporains vivent de sensations et restent à la superficie, pratiquant une sorte de surf spirituel. Par l’onction, nous pouvons effectuer des temps de plongée qui nous permettent de considérer en profondeur notre vie personnelle, spirituelle.
Que cette célébration et la semaine sainte que nous allons vivre, nous fassent bien comprendre qu’aujourd’hui la parole d’Isaïe s’accomplit !
+ Nicolas SOUCHU
Évêque d’Aire et Dax